Notre histoire

Le rêve

Dès l'enfance, Benoit Coulombe rêvait déjà d'être agriculteur. Bien que certains aient tenté de le décourager, sa persévérance et sa détermination l'ont mené à tracer son propre chemin.

Après ses études secondaires, il a intégré le milieu agricole grâce à une formation en production agricole suivie au Centre des Moissons de Beauharnois. Il a ensuite intégré le métier en travaillant auprès d'agronomes compétents et, en bon autodidacte, il a entrepris l'étude de documents de recherche. Ayant acquis une expertise de plus de 20 ans sur le terrain, Benoit a été dépisteur en agriculture fruitière et maraîchère, conseiller en service technique sur des fermes, consultant en développement des affaires agricoles, enseignant en production horticole au Centre des Moissons où il avait été formé puis adjoint à la direction des services agricoles en entreprise.

La bicentenaire

En 2014, lui et son ancienne conjointe, Nancy Blanchette, ont découvert sur le chemin Napper à Hemmingford quelques acres de terre en friche et sur laquelle se trouvait une propriété construite en 1830. D'abord en pierres, un revêtement en bardeaux de bois peints en ocre et une toiture en tôle rouge sont venus habiller la bicentenaire, puis la grange adjacent le mur ouest de l'habitation a été gardée en bois naturel.

Une rumeur circule dans la région comme quoi cette maison aurait été construite par John Gill Napper (1777-1858), un descendant irlandais immigré au 19e siècle dont 150 acres de la Couronne lui auraient été octroyés, ce qui aurait inspirée la toponymie du chemin portant le même nom. La pierre tombale de cet homme est d'ailleurs l'une des seules demeurées intactes dans le cimetière anglican St-Paul's abandonné, un ancien lieu de culte caché dans les broussailles à moins d'un kilomètre du 753 chemin Napper.

Et voilà que dans l'optique d'y fonder une bleuetière biologique basée sur l'autocueillette et la production artisanale, Nancy, Benoit et leurs 3 garçons, Baptiste, Caleb et Jeremy, emménageaient dans cette maison.

Les débuts à la ferme

Au départ, seulement 4 des 48 acres de la Ferme Giroflée étaient cultivables. Des arbres, des racines et d'énormes rochers ont dû être délogés mécaniquement. Un travail de terrain en profondeur a été effectué pour rendre ces terres favorables à la culture. Pour certains sols, c'était 4 ans de labeur, des amendements de fumier, d'engrais verts et des périodes de jachère.

La conception de l'aménagement a été réalisé avec l'idée de respecter l'équilibre de l'écosystème naturel. Une portion du terrain a été maintenue et une autre créée comme milieux humides et la majorité du terrain est demeuré forestier. Côté maraîchage, les 4000 premiers bleuetiers ont été implantés sur une période de 3 ans. Aujourd'hui, ce sont 6500 plants qui se dressent sur les 6,5 acres de la bleuetière qui a obtenu sa certification biologique par Ecocert Canada en 2017.

Le défi du bleuet bio

Le bleuet aime les terres rocheuses et les couverts forestiers, la symbiose des champignons et des bactéries. Mais son système racinaire est fragile et le plant peut rapidement être étouffé par les mauvaises herbes. C'est le défi du bleuet bio.

En production conventionnelle, avec les herbicides, la biodiversité du sol est anéantie, le système de défense des sols est réduit et le bleuet devient plus vulnérable aux maladies. Il faut donc appliquer des fongicides puis ajouter des insecticides pour le contrôle des ravageurs. Comparativement à cette dernière, une bleuetière biologique comme celle de la Ferme Giroflée coûte de 15 à 20 fois le prix en main d'œuvre et en copeaux de bois pour le désherbage, mais nous préférons investir dans la création d'emplois plutôt que dans les herbicides parce que nous cherchons à produire la meilleure qualité de bleuet possible pour la santé humaine et celle de l'ensemble du vivant. 8 à 10 années sont estimées pour l'implantation du bleuet au champ et l'atteinte d'une stabilité financière d'une bleuetière. C'est principalement pour cela que nous en avons très peu au Québec, surtout dans le biologique, bien que la demande soit forte pour les délicieuses baies bleues.

Des légumes, des petits fruits et un laboratoire vivant

Néanmoins, la Ferme Giroflée est bien plus qu'une bleuetière bio. Plusieurs cultivars de poivrons, de tomates cerises et de piments forts ont réussi à se tailler une place depuis quelques années dans nos champs en plus de la mini-aubergine et du cucamelon (communément appelé melon-souris). Chaque année, différentes variétés sont soumises à l'expérimentation pour le plaisir de nos papilles, de nos yeux et pour le bénéfice de notre bonne santé.

La Giroflée a aussi été conçue comme un laboratoire vivant pour la transition socioenvironnementale. Il y a eu d'abord le projet d'incubateur dans lequel nous louions des bouts de terre à des restaurateurs et aspirants maraîchers afin permettre l'expérimentation de projets agroalimentaires en démarrage, puis sont venus le Collectif Giroflée, un regroupement de maraîchers artisanaux produisant une variété de fruits et légumes biologiques, et le Collectif de Bleuets Bio Local avec des bleuetières bio québécoises. Le projet d'incubateur et l'idéal de collectif comme modèle de communalisation pour la mise en marché de produits bio en tant qu'entreprise d'économie sociale nous ont permis de remporter le premier tour du concours Startup 54 Chrono en 2018.

L'esprit communautaire

Ayant l'esprit communautaire, Benoit souhaite également plus de rapprochement entre les humains et la nature. Pour lui, la communauté est le tissu social nécessaire à la co-construction de la transition socioécologique. Il porte une vision permaculturelle de la communauté qui passe par la culture des humains en synergie avec l'environnement.

Bien qu'ils ne forment plus un couple, Nancy et lui demeurent de solides piliers pour la Ferme Giroflée et une équipe pluridisciplinaire s'agrandit année après année. L'objectif est maintenant de coconstruire de nouveaux projets sur le site par l'entremise de différentes initiatives faites pour et par la communauté. Un espace où la cocréation, les arts et la science se combinent pour faire place à la concrétisation de nouvelles idées.

Et c'est unanime, cet oasis situé à la croisée des chemins Williams et Napper dans le Canton d'Hemmingford est un endroit des plus agréables où passer un peu de temps, que ce soit pour la cueillette du bleuet et d'autres variétés, apprendre à bien se nourrir, apprendre sur l'agroécologie ou profiter pour prendre un bain de nature. La Ferme Giroflée est assurément un havre de paix pour tous ceux et toutes celles qui cherchent à se ressourcer le temps d'une douce matinée.